Hafoussoi Vandewalle
23 Apr
23Apr

Connaissez-vous l’origine du mot nappy et comment il a joué un rôle clé dans la réhabilitation des cheveux bouclés, frisés et crépus ?


D’où vient le mot “Nappy” ?

Le terme "nappy" vient de l’anglais nap, qui désignait à l’origine la texture laineuse des fibres textiles… un mot qui, utilisé pour décrire les cheveux des personnes afro descendantes, portait une connotation profondément péjorative.


Depuis l'esclavage, dans une société americaine dominée par des normes de beauté eurocentrées, les cheveux crépus étaient perçus comme "non civilisés", "non professionnels" ou "à dompter". Le mot "nappy" incarnait alors ces stéréotypes racistes, rabaissant une texture capillaire pourtant riche de sens et de beauté.


Réappropriation et fierté : la renaissance du mot “Nappy”

Dans les années 60 et 70, les mouvements des droits civiques et du Black Power ont radicalement changé la donne aux États-Unis. Des figures militantes ont commencé à revendiquer fièrement leurs cheveux naturels, faisant de leur apparence un acte de résistance et d’affirmation identitaire. 

Le mot "nappy" a été réinvesti par les communautés noires, devenant un symbole de liberté, de fierté culturelle et d'acceptation de soi. 

Dans les années 2000, la contraction de natural et happy dans "nappy" vient renforcer ce message positif : être soi-même, au naturel, rend heureux.


Le mouvement Nappy en France : une affirmation tardive mais puissante


En France, le mouvement Nappy émerge au début des années 2000, porté par des forums pionniers comme Beauté d’AfrikBoucles & Cotons (créé par Kelly Massol), ou encore Cheveux d'Ébène (de Naturi Ebène). 

Le véritable tournant s’opère en 2005, lorsque Aline Tacite et sa sœur Marina organisent le premier événement entièrement dédié à la beauté des cheveux texturés : Boucle d’Ébène

Aujourd’hui, Boucle d’Ébène est à la fois un salon de coiffure, un centre de formation, et un symbole de professionnalisation autour des cheveux texturés. Des influenceuses comme Fatou N’Diaye (créatrice du blog Black Beauty Bag) ont aussi largement contribué à démocratiser cette vision inclusive et valorisante du cheveu naturel.


Un mouvement universel et inclusif

Initialement centré sur les femmes afrodescendantes, le mouvement Nappy a su fédérer bien au-delà. Aujourd’hui, toutes les personnes aux cheveux texturés – quelle que soit leur origine – se sentent concernées. Une nouvelle génération d'influenceurs comme Kenza Bel Kenadil encourage les jeunes femmes à porter leurs cheveux naturels avec fierté. 

Des initiatives comme "Hrach is Beautiful" incite les personnes originaires d'Afrique du Nord à  assumer leurs cheveux texturés. Enfin, des créatrices de contenus comme Laureen Schein ont fait de leur amour de leur boucle un business florissant avec un site e-commerce La belle Boucle et La belle boucle Studio, une chaîne de salons de coiffure spécialisés dans les cheveux texturés. 

Le mouvement Nappy  montre  combien cette quête d’acceptation est devenue transversale. Ce mouvement a non seulement transformé les mentalités, mais aussi bouleversé les comportements de consommation. Fini les produits agressifs qui lissent, dénaturent ou abîment les cheveux. Place aux soins naturels, respectueux de la santé capillaire et de l’identité de chacun(e).


Une nouvelle ère pour la cosmétique capillaire

Ce retour au naturel a marqué un tournant décisif dans la manière dont les cheveux texturés sont perçus et traités. Il a permis l’émergence d’une nouvelle génération de marques françaises, créées par et pour les personnes concernées, avec une connaissance fine des besoins spécifiques de ces cheveux. 

Des marques comme Les Secrets de Loly, Kalia Nature, Noire au Naturel, Madame la Présidente, entre autres, se sont imposées comme des références. Elles proposent des produits à la fois efficaces, sensoriels et respectueux de la santé des cheveux comme de l’environnement. 

Engagées, elles valorisent une approche inclusive de la beauté et contribuent à redéfinir les standards du soin capillaire en France.


La formation, clé d’un avenir inclusif

Malgré ces avancées, un point reste encore en retard : la formation des coiffeurs traditionnels. Trop souvent, les professionnels de la coiffure manquent de compétences techniques pour accueillir, coiffer et sublimer les cheveux bouclés, frisés ou crépus. Si les cheveux texturés sont si mal pris en charge, c’est surtout parce qu’ils sont presque absents des formations de coiffure, qui ne prévoient quasiment aucun module pour les comprendre et les coiffer au naturel. 

Heureusement, des acteurs engagés œuvrent pour former une nouvelle génération de coiffeurs, compétents et ouverts à toutes les textures. Aude Livoreil-Djampou avec Studio Anaé, Ghana Elin pour Les Ateliers Crépus, Daba Diokhané pour  Dioka, Aline Tacite avec Boucle d’Ébène ou encore Kelly Massol avec Les Secrets de Loly Académy se battent pour combler ce manque de professionnels des cheveux texturés. 


S’adapter aux nouveaux visages de la beauté

Les attentes des clients évoluent, le monde de la coiffure aussi. Intégrer les cheveux texturés à votre expertise, c’est bien plus qu’une simple adaptation : c’est saisir l’opportunité de répondre à une demande grandissante et de participer à une transformation profonde du secteur de la coiffure.

En se formant à ces textures longtemps négligées, les coiffeurs ouvrent la voie à une approche plus inclusive et moderne de la coiffure, valorisant chaque type de cheveux et chaque personnalité. 

Ces professionnels de la coiffure gagnent en technicité tout en enrichissant leur savoir-faire, offrant ainsi une expérience sur mesure à une clientèle de plus en plus diversifiée et fidèle. Au-delà des bénéfices économiques évidents, c’est une richesse humaine qui les attend : celle de redonner à chacun la possibilité d’être coiffé avec respect et expertise, dans un environnement bienveillant.

Alors, devenez acteur de ce changement, et contribuez à une beauté qui reflète toutes les identités.


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